Les Editos
«Les jouets sont vivants et ils veulent nous tuer» par Sid Phillips
J’ai longtemps hésité à en parler. Quand je racontais cette histoire, ce traumatisme, à mon assistante sociale, à mes psy et mes employeurs, tous les gens se moquaient, ils riaient de moi. Aujourd’hui, j’ai le courage de parler et de raconter mon histoire. Pour ne pas qu’un autre enfant en soit victime et ne vive ce que j’ai pu vivre, à savoir toutes ces années de souffrances et de traitement.
J’ai longtemps hésité à en parler. Quand je racontais cette histoire, ce traumatisme, à mon assistante sociale, à mes psy et mes employeurs, tous les gens se moquaient, ils riaient de moi. Aujourd’hui, j’ai le courage de parler et de raconter mon histoire. Pour ne pas qu’un autre enfant en soit victime et ne vive ce que j’ai pu vivre, à savoir toutes ces années de souffrances et de traitement.
C’était il y a très longtemps. J’étais un enfant comme les autres qui a des jeux de son âge. Que celui qui n’a jamais écrasé une voiture miniature dans un étau ou tenté la transplantation d’une tête de ptérodactyle sur une poupée de chiffon me jette la première pierre. Certains diront que je torturais aveuglement des jouets. J’aimais cela car ça faisait passer le temps, comme aujourd’hui on joue à des jeux vidéo violents. Mais je n’étais pas plus violent qu’un autre enfant.
Tout a commencé par une virée dans une pizzeria de ma ville natale, Pizza Planet. J’ai remporté trois jouets dans un jeu avec un grappin téléguidé. Je les ai rapportés chez moi et j’ai commencé à jouer avec. J’ignorais que déjà dans l’ombre « ils » avaient des plans pour moi. Je n’avais pas gagné par hasard ces jouets. Tout était planifié d’avance et moi, pauvre victime, j’avais ouvert la porte de ma chambre d’enfant à mes propres bourreaux.
Et c’est lorsque j’ai voulu jouer avec l’astronaute que les choses ont dérapé. Je venais de le fixer une fusée – ou un pétard, je ne sais plus – quand j’ai remarqué que l’autre jouet, une figurine articulée de cow-bow était là aussi, dans le jardin. Mais comment le cow-boy était-il arrivé ici ? L’instant d’avant, il était à l’étage dans ma chambre. J’aurais dû avoir un premier doute mais étant un enfant innocent et équilibré, rien ne me prédestinait au moment de terreur que j’allais vivre quelques secondes plus tard.
Et puis le jouet m’a parlé, avec sa voix enregistrée. Mais ce n’était pas une simple bande, c’était le jouet qui me parlait, avec des mots qui m’étaient destinés, il citait mon prénom, le jouet connaissait mon prénom et il me demandait d’arrêter de faire du mal aux autres jouets. J’ai soudain réalisé que d’autres jouets m’encerclaient. Ils prenaient vie, tout autour de moi. Ils me menaçaient, et dans quelques secondes, ils allaient se venger et me tuer. Et puis le cow-boy s’est une dernière fois adressé à moi et cette fois il bougeait vraiment. Il a dit quelque chose sur la violence.
J’ai hurlé de terreur. J’ai lâché le jouet et j’ai couru me réfugier dans ma chambre.
C’est ce jour là que j’ai vu, que j’ai compris. Les jouets sont vivants. Les jouets sont vivants et veulent nous tuer. Il sont partout. Dans les coffres de vos enfants, dans leur chambre, sous leur lit. Ils n’attendent que le moment opportun pour passer à l’action. Bien sûr, vous ne remarquerez rien au début, ils se forcent à être totalement inanimés quand ils sont en présence d’humains. Mais je sais ce que j’ai vu. Mais personne ne m’a jamais cru. On m’a mis sous calmant, on m’a montré à des spécialistes. Personne ne m’a jamais cru.
Ne faites pas confiance aux jouets, n’en achetez pas, jamais. Ce n’est pas vous qui les possédez, ce sont eux qui vous possèdent.
Sid Phillips