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France

Le seul cancer de notre société, c’est le cancer

Ces derniers mois, on a beaucoup parlé du cancer.

Avant l’annonce de Charles III ou plus récemment de Kate, il y a eu aussi la journaliste Clémentine Vergnaud qui avec courage a documenté sa maladie, avec pudeur et dignité, sans jamais s’appesantir, et tout en regardant la maladie en face. Son podcast a par ailleurs été récompensé du grand prix des Assises du journalisme.

Publié le

 mar 


Au-delà du grand public, le cancer touche indifféremment. Et parfois, cela peut-être aussi un ami, un proche, qui un jour au détour d’un déjeuner ou d’une discussion vous annonce qu’il a “quelque chose” et “que c’est grave”. 

Un jour de 2022, il apprend un nouveau mot. Un mot qu’il n’avait jamais entendu parler. Glioblastome. Stade quatre.

D’entrée, le médecin lui a dit : “C’est opérable”.

Puis fin 2022, il a commencé la chimiothérapie.

Pendant ce temps, chaque jour, il écrit.

Chaque jour, il ouvre son appli sur son téléphone.

Il s’installe sur son canapé, celui qui est près de la fenêtre, à côté de sa vieille chaîne stéréo et de ses vinyles. La maison est silencieuse. Ses trois enfants sont occupés à leurs devoirs. Sa femme vient de rentrer de sa journée de travail. Il lève la tête en l’air et il écrit.

C’est le même rituel chaque jour, depuis mille sept cent trois jours.

Il a commencé à écrire un jour ordinaire de juillet 2019.

Un petit paragraphe, un incipit, une petite ouverture de ce qui pourrait être un grand récit. Chaque jour, il poste ainsi sur ses réseaux cette petite capsule littéraire. Chacun d’entre eux est une porte ouverte sur un monde fugace et fragile, qui ne tient qu’en quelques lignes. Quelques mots et c’est déjà terminé.

Mais il continue. Il continue d’écrire, inlassablement, malgré la douleur, la fatigue, les analyses, les allers-retours en métro et les promenades dans le petit jardin de l’hôpital. Il les poste sur son compte. Il n’attend rien en retour. Il veut juste laisser une trace. Les textes sont toujours ces petites fenêtres sur une aventure, mais la sienne. Sa lutte contre la maladie, la douleur quotidienne, le temps qui passe, cette vie qui file entre ses doigts et la fin, qui s’approche bien trop vite.

Il ne s’apitoie pas, il ne cherche pas la pitié. Des fois, son ton se fait plus grave, plus solennel. Il s’arrête et il nous rappelle que tout va si vite, que cette vie qui file entre ses doigts c’est aussi la votre et vos mains et qu’il faut parfois s’arrêter. Il faut la saisir tant qu’il est temps, et qu’il faut prendre le temps, il faut être heureux et que demain, demain ne peut très bien ne plus exister.

Derrière ses petits incipits, il nous regarde continuer de vivre et il voudrait que nous continuions, sans s’arrêter.

Et peu importe ce glioblastome, ce compte à rebours, il continue d’écrire. Aujourd’hui, demain, demain soir, il ouvrira encore son appli. Il écrira quelques lignes. Il se félicitera de telle ou telle tournure, ou d’une figure de style inédite.

Puis il la postera sur son compte et il ira se coucher, épuisé par la fatigue et les traitements. Il ira embrasser ses trois enfants, et sa femme.

Et puis avant de s’endormir, peut-être qu’il réfléchira aux premiers mots de son incipit de demain. Et d’après-demain.

Les Incipits de Benjamin

Le Podcast de Clémentine Vergnaud

Pour faire un don à la Ligue contre le Cancer 

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